Madame la Ministre,
Au nom de DEI France, je souhaite vous manifester notre satisfaction de vous voir accéder à ces fonctions ministérielles associant l’enfance, la famille et la jeunesse dans une réelle cohérence politique. Notre association a pour objet de faire connaitre et appliquer la Convention internationale des Droits de l’Enfant. Elle participe aux travaux du HCFEA et intervient avec de nombreuses autres ONG dans le domaine de votre ministère.
La suppression du Secrétariat d’état à l’enfance rattaché dans le précédent gouvernement à la Première ministre – une première dans l’Histoire de France – nous avait fait craindre que l’enfance ne soit plus affirmée par l’État comme un objet de politique publique prioritaire au risque de faire douter de la sincérité de l’engagement pris par le président de la République candidat à sa réélection.
Il revient donc désormais à votre département ministériel, dans le prolongement du précédent Secrétariat d’État, de veiller au respect par la France des engagements souscrits à travers sa ratification de la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989.
En juin 2023 le Comité des droits de l’enfant de l’ONU (« CDE-ONU ») a exprimé à la France ses Observations et Recommandations suite à ses 4e et 5e rapports. Tout en lui donnant acte des efforts déployés, le Comité relevait les points où notre pays avait encore, selon lui, à renforcer ses engagements pour réduire un fossé encore trop fréquent entre l’affichage formel des droits et leur concrétisation dans la vie quotidienne des enfants de France.
Incontestablement, et pour ne s’attacher qu’aux points majeurs aux yeux du CDE-ONU, des efforts s’imposent encore pour garantir aux enfants un niveau de vie décent quand 3 millions vivent encore sous le seuil de pauvreté avec toutes les conséquences pour leur vie quotidienne et leur devenir. Trop d’enfants porteurs de handicap ne bénéficient toujours pas du droit à l’éducation inscrit dans la loi de 2005 . Plus largement notre dispositif de protection de l’enfance en danger est en grande souffrance. Le Comité a aussi relevé clairement et fermement la situation délicate des enfants vivant dans plusieurs territoires ultramarins.
Présents à Genève, nous souhaitons aujourd’hui que vous soyez déterminée à donner une suite aux Recommandations du Comité qui éclairent d’un certain regard critique l’image internationale de notre pays.
En effet, l’État a ici un rôle majeur à tenir pour promouvoir la mobilisation sur tout le territoire des acteurs privés et publics pour créer un climat favorable à une meilleure prise en compte des droits de tous les enfants.
La démarche interministérielle, innovante mais encore timide, engagée par le précédent gouvernement doit être renforcée pour que les différents services de l’État articulent mieux leurs interventions.
Pour permettre à tous les enfants d’accéder à leurs droits fondamentaux, l’Etat lui-même doit encore renforcer sa présence sur les territoires, dans le respect de l’autonomie des collectivités territoriales.
Il faut pour cela que l’État exerce mieux ses responsabilités propres pour redevenir crédible aux yeux de ses partenaires publics et associatifs. Il doit se doter des moyens humains et financiers, institutionnels et techniques qu’impliquent ses responsabilités.
Nous ne partons pas de rien et de nombreux efforts ont été développés de longue date et encore dans la dernière période. Il convient de les parachever pour qu’ils produisent les effets attendus.
Afin de contribuer à identifier les priorités au regard des Observations et Recommandations du Comité des droits de l’enfant de l’ONU, conscients des obstacles qui peuvent se dresser devant vous, nous sollicitons Madame la ministre de votre part une audience.
De nombreux dossiers pendants nécessitent des réponses urgentes:
– la clarification législative des responsabilités des adultes en charge d’enfants,
– le renouveau du dispositif de protection de l’enfance en danger,
– le soutien psychologique et psychiatrique à apporter aux jeunes enfants, aux adolescents et aux jeunes,
– la scolarisation de tous les enfants au mieux de leurs possibilités, l’accès de tous à la culture aux sports et aux loisirs,
– les réponses à apporter aux mineurs étrangers qui se présentent isolés sur le territoire national,
– le débat sur la laïcité et la hiérarchie des normes, etc.
Dans l’esprit de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, nous sommes particulièrement sensibles au fait que selon leur développement, les lieux, les questions posées les enfants puissent être reconnus dans leurs compétences, légitimes à exprimer un point et à agir leurs droits. Beaucoup reste à faire dans l’intérêt des enfants ici présents aujourd’hui, mais encore dans l’intérêt même de notre démocratie demain.
Avec l’espoir de pouvoir échanger avec vous et dans cette attente, nous vous assurons Madame la Ministre de notre parfaite et haute considération.
Paris le 15 février 2024
Le Président
Alain Cornec
24 02 15 DEI France – Courrier Ministre V3 ACMP